Culture

L’Artothèque d’Angers a 40 ans cette année. Entretien avec sa responsable Elodie Derval, qui rend hommage à la direction artistique de Joëlle Lebailly, fondatrice de l’Artothèque, disparue l’année dernière.

Qu’est-ce qui a motivé la création d’une artothèque à Angers dans les années 1980 ?

Né à Berlin au début du XXème siècle, le concept d’artothèque s’est institutionnalisé en France dans les années 80. Les artothèques dites de « première génération » ont été soutenues par le Ministère de la culture, sous Jack Lang, avec le souhait de décentraliser l’art contemporain en région. En parallèle des Frac (Fonds régionaux d’art contemporain), elles agissent en lien avec les territoires qui le souhaitent, dans le but de rendre accessible et démocratiser l’art contemporain au plus grand nombre. Sous l’égide du maire Jean Monnier, de son adjoint à la culture Gérard Pilet, une convention est établie en 1982 entre la Ville d’Angers et le Ministère de la Culture pour la fondation d’une artothèque à Angers. Le 17 avril 1984, l’Artothèque d’Angers ouvre ses portes au 72 de la rue Bressigny, dans l’enceinte de l’Ecole des Beaux-Arts, avec 174 œuvres

Quelle a été l’orientation de l’Artothèque d’Angers, sous l’impulsion de sa directrice Joëlle Lebailly ?

Comme toutes les artothèques dites de première génération, l’Artothèque d’Angers a ouvert ses portes avec une collection orientée autour de l’œuvre imprimée, de l’édition originale et s’est fait l’écho de la diversité de la création des années 50 à 80. La direction artistique s’est ensuite orientée vers des axes forts construits auprès d’artistes émergents du territoire (Bogdan Konopka, Edward Baran…) mais également de renommée internationale (William Klein, Ernest Pignon-Ernest…). Dès lors, se sont développés des recueils d’œuvres graphiques autour de l’estampe dans toute sa diversité : l’expérimentation, l’abstraction géométrique des années 70 à aujourd’hui, le dessin contemporain, le paysage naturel, urbain, intérieur ou mental, notamment à travers le médium photographique… Puis de manière singulière, l’Artothèque d’Angers a fait le choix de développer l’acquisitions d’œuvres vidéo.

Au fil des années, Joëlle Lebailly a su développer et enrichir une collection qui a aujourd'hui une très belle renommée à la dimension territoriale, nationale et internationale. Dotée d’une véritable exigence du regard dans les accrochages, elle a ainsi pu réaliser plus d’une centaine d’expositions dans et hors les murs. Ces projets artistiques ont pu être créés grâce aux liens très étroits qu’elle a construits avec différents acteurs incontournables de la création, comme des galeries d’art mais également avec de grands professionnels de l’estampe.

Quels ont été les tournants historiques pour l’Artothèque d’Angers ? 

En 2013, l’Artothèque est rattachée aux Musées d’Angers et change de responsable. Dans la continuité des actions menées par Joëlle Lebailly, nous poursuivons depuis onze ans les missions de démocratisation, d’ouverture vers l’art contemporain et de soutien aux artistes qui incombent aux artothèques. 

En 2020, le déménagement au RU - Repaire Urbain, Ouvre une nouvelle fenêtre a permis d’asseoir la richesse de la collection en lui offrant un lieu propice à la création, à la conservation et à l’exposition. L’Artothèque d’Angers a vu sa fréquentation multipliée par dix en cinq ans, passant de 1 600 visiteurs par an en 2019 à plus de 16 000 en 2023 ! Le travail réalisé en synergie avec les équipes d’Angers Patrimoine et des Archives Patrimoniales renforce l’accessibilité en croisant les publics et en favorisant un accueil de qualité. 

Quelles sont les orientations actuelles de l’Artothèque d’Angers ?

Soutenu, tant par les propositions d’acquisitions que par la création d’outils pédagogiques, le dessin contemporain trouve désormais une place de choix sur les grilles l’Artothèque d’Angers. 

La mise à disposition d’un atelier de résidence d’artiste au sein du RU - Repaire Urbain a permis à l’Artothèque et aux Musées d’Angers de créer un précieux partenariat avec la fondation Mécène et Loire, Ouvre une nouvelle fenêtre pendant quatre ans, enrichissant ainsi la collection de soixante-douze œuvres photographiques qui apportent un regard résolument contemporain sur les paysages et sur le patrimoine de l’Anjou.

Qu’est-il prévu autour de cette date anniversaire ?

L’Artothèque d’Angers présente un premier accrochage à travers une sélection d’œuvres ayant marqué l’histoire de sa collection. Parmi un fonds de 1 385 pièces, ce choix s’est orienté vers les œuvres représentatives de la singularité des différentes directions artistiques. De ce fait, l’exposition Traversée # 1 offre une exploration des grandes orientations scientifiques, principalement en photographie : le paysage, l’architecture, le trouble et le portrait. 

Pour rendre hommage à la direction artistique de Joëlle Lebailly, douze artistes soutenus, accompagnés et exposés par l’Artothèque d’Angers ont été invités à présenter une œuvre récente. Cette sélection marque la diversité de la collection à travers photographie et œuvres graphiques, l’évolution du travail des artistes ancrée dans la collection et la création, et donne un regard sur l’art d’aujourd’hui. 

En parallèle de cette exposition, vous pouvez découvrir au RU - Repaire Urbain l’exposition Paysage - Matière à pensées  : des artistes contemporains font dialoguer leurs œuvres avec des grands noms des collections de l’Artothèque et du Frac des Pays de la Loire.

Autour de l’exposition Traversée #1 : quiz sur les 40 ans, pochettes surprise pour les abonnés, visites commentées, table ronde, atelier en famille, Nuit de la sérigraphie… Tout le programme est en ligne sur le site des Musées d'Angers, Ouvre une nouvelle fenêtre.