Compléments historiques :
Jusqu´au 19e siècle, le site de l´actuelle place La Rochefoucault-Liancourt constituait une partie du cours même de la Maine, parsemé d´îles et de prairies inondables. Plus large qu´aujourd´hui, la rivière coulait le long du mur de clôture de l´hôpital Saint-Jean, qui relevait de l´enceinte urbaine du 13e siècle, entre la tour de la Haute-Chaîne et la chaussée à moulins des Treilles. Face à l´hôpital et à l´actuelle Ecole des arts et métiers, deux îles, grande et petite (îles ou prés Saint-Jean), divisaient ponctuellement en deux bras la rivière, dont le cours réunifié en aval enserrait, avec le canal des Tanneries, la plus grande île de la ville et la seule habitée, l´île des Carmes.
Avec la construction du pont de la Haute-Chaîne, dans les années 1830, se pose naturellement la question de la régularisation du cours de la Maine, et donc de la viabilisation des grèves des deux rives. Des projets d´amplitude variable sont examinés. Un plan de l´ingénieur Adolphe Fourier de 1833 prévoit, côté Doutre, une solution minimale par un quai rejoignant la rue Beaurepaire, le long du canal des Tanneries réduit à un filet d´eau, les îles Saint-Jean destinées à disparaître par submersion. Un autre plan, daté de 1835, s´avère plus ambitieux : le quai devant englober la partie nord de l´île des Carmes, rattachée à la Doutre, en utilisant l´île Saint-Jean comme substrat ; le terrain ainsi obtenu devait permettre la création de nouveaux îlots d´habitation. Projets sans suite.
Les importantes inondations de 1856 remettent le sujet d´actualité : le comblement du canal des Tanneries, décidé en 1862, entraîne le rattachement de l´île des Carmes et la création des boulevards du Ronceray et Henri-Arnaud ; mais en amont la situation reste inchangée, en dépit des plans de ville édités dans ces années 1860-1880 figurant invariablement les projets de quais et de lotissements comme s´ils étaient acquis, voire réalisés. Les premiers travaux de remblaiement commencent en 1877 par la constitution d´un quai entre l´extrémité de l´île des Carmes et le pont de la Haute-Chaîne (futur quai Monge) sous l´égide des Ponts et Chaussées. Mais le comblement, à la charge de la Ville, tarde au point de transformer en boire le bras emprisonné de la Maine entre l´ancienne île Saint-Jean et la rive droite.
Après quelques tensions entre l´Etat et la Ville sur la conduite des opérations, les travaux s´achèvent vers 1885. Délimité à l'ouest par la rue du Godet, le nouvel espace créé est divisé en trois parties : le grand terre-plein central entre le boulevard Arago et le quai Monge devient la place La Rochefoucault-Liancourt, du nom du fondateur des écoles des Arts et Métiers ; la partie triangulaire située entre le boulevard Arago et l´Ecole des Arts et Métiers prend le nom de place des Arts ; enfin, une esplanade d´une soixantaine de mètres de large sur cent mètres de long - avenue de l´Ecole des Arts - précède l´entrée monumentale de l´établissement. Des plantations d´arbres délimitent tous ces espaces. Quelques embellissements devant l´Ecole voient le jour, ainsi un kiosque à musique en 1892 (le second après celui du jardin du Mail) que devait accompagner, selon une délibération municipale, un square circulaire bordé d´acacias boules. Souvent détériorés, ceux-ci ont assurément disparu en 1924 quand la place des Arts est avalée par les extensions de l´Ecole.
Dès sa création, cet espace arboré en coeur de ville, vide de toute construction, répond à des besoins que les rares autres places d´Angers ne pouvaient satisfaire. Le quartier de la Doutre bénéficie de l´activité économique de ce nouveau champ de foire (1ère appellation) qui reçoit mensuellement le marché aux bestiaux, auparavant installé dans le quartier de Saint-Serge. Tout aussi rapidement, la place accueille toutes les manifestations de grande envergure spatiale : fêtes des Fleurs de 1894, festivités de toutes sortes, théâtre, musique, cirque, feux d´artifices, revues militaires, fêtes nationales du 14 Juillet, concours agricoles, congrès, jusqu´à des courses de taureaux et des arrivées du Tour de France ; la foire-exposition d´Angers s´y installe de 1936 à 1984, et la fête de Saint-Martin s´y déroule depuis 1964. Plus prosaïquement, la place La Rochefoucault rend un grand service quotidien aux habitants des deux rives, en assurant l´unique stationnement gratuit du centre ville.
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